
Mais dans beaucoup de milieux, cette liberté est relative. Ainsi, si pour l’opposition la liberté de la presse doit être au service de l’opposition et de sa lutte, pour le pouvoir elle doit soutenir l’action du gouvernement et des institutions officielles. Ne pas le faire met le journaliste devant plus d’un feu. Souvent, dans ce pays, il est difficile de dire de qui est venue la balle qui a descendu un journaliste. Souvent, le crime profite à l’opposition qui trouve dans ces crimes l’occasion de démontrer les faiblesses du gouvernement de protéger les journalistes.
Très souvent, l’opposition accuse purement et simplement le pouvoir d’être l’auteur des crimes sur les personnes des journalistes. Lorsque les journalistes marchent et vont déposer leur mémorandum aux responsables de l’Etat, loin est d’eux la démarche qui consisterait à faire croire que ce sont les pouvoirs publics qui tuent et menacent les journalistes.
Par contre, les journalistes reconnaissent aux pouvoirs publics la charge de protéger tous les citoyens congolais et plus particulièrement les journalistes à cause de la délicatesse de leur métier. Au moment où les journalistes et hommes de médias ont pris la résolution de dénoncer les menaces dont ils sont l’objet de la part des lâches qui ont peur du miroir parce qu’il leur renvoie à la face leur laideur, il faut également dénoncer la récupération politicienne des crimes contre les journalistes. Il est temps que l’on cesse de chercher à se faire une fortune politique sur le sang des journalistes. Le gouvernement, mieux les pouvoirs publics ne pourront pas lutter efficacement contre les crimes et protéger les journalistes s’ils n’ont pas conscience que les criminels se recrutent aussi dans toutes les couches de la population.
Une autre façon d’exploiter politiquement les crimes et les menaces faites aux journalistes, c’est de chercher de façon permanente à trouver des commanditaires (préconçus) des crimes contre les journalistes à tel point que ceux qui sont arrêtés et jugés sont toujours considérés comme des innocents, sinon des sous-traitants. Il n’y a pas meilleure façon de décourager la justice et la police que de ne pas les encourager pour les efforts fournis.
L’insécurité des journalistes vient également de la profession elle-même. C’est le moment de nous remémorer ce conseil d’un sage africain qui disait : " Chaque fois qu’il vous arrive un malheur mon fils, cherchez-en la cause en vous-même, d’abord en vous-même". Quelle est la part des milieux des médias dans les malheurs des journalistes ? Il est temps de faire une autocritique sans complaisance. Il est vrai que l’heure n’est pas à l’auto-flagellation, mais quelle dignité, quelle liberté peut avoir un journaliste impayé, sous-payé, obligé de vivre d’expédients et du " coupage " ? Pourquoi il n’y a jamais de lutte pour ces causes pourtant nobles ? En attendant voir un jour s’organiser une marche pour dénoncer les mauvaises conditions de travail des journalistes, encourageons la marche d’hier jeudi.
En effet, les professionnels des médias congolais étaient hier dans les rues pour une marche pacifique l’objet étant de demander à l’autorité publique la protection de leur métier. Car, ces dernières années, on a assisté à une vague d’assassinats des journalistes, particulièrement à Bukavu où les journalistes ont été tués au rythme annuel. Le bol était plein lorsqu’avant même que l’on ait fini d’essuyer les larmes à la suite de l’assassinant de Bruno, des menaces de mort précises ont été lancées à l’endroit d’autres consœurs. Sous la houlette de l’Union de la presse congolaise, chaque province devrait marcher selon l’itinéraire choisi pour déposer un mémorandum aux autorités publiques.
A Kinshasa, la marche est partie du siège de l’Union nationale de la presse congolaise (Unpc) sur l’avenue de la presse, derrière l’hôtel Memling. De l’avenue de la presse, les manifestants ont emprunté l’avenue Tombalbaye pour atteindre l’avenue des Huileries jusqu’ au Palais du peuple, siège du parlement congolais, où un mémo a été remis au président de la Chambre basse du parlement, Evariste Boshab. " Non à l’impunité ", c’est le slogan choisi par les manifestants et que l’on pouvait lire sur des calicots.
" Nous voulons interpeller le gouvernement pour lui demander plus de protection pour les journalistes congolais. 3 journalistes ont été tués à Bukavu en l’espace de deux ans. Trois autres femmes journalistes viennent de subir des menaces de mort. C’en est trop. Le gouvernement doit agir ", a déclaré Chantale Kanyimbo, présidente de l’Union nationale de la presse congolaise, elle-même journaliste à la Radio télévision nationale congolaise (Rtnc).
Dans le mémo remis au président de l’Assemblée nationale congolaise, les journalistes interpellent le gouvernement congolais qui doit donner un contenu à l’opération Tolérance zéro. " Nous demandons à l’Etat congolais d’annihiler ce regain de violence par la réalisation des enquêtes sérieuses, traquer les criminels, les poursuivre et les châtier d’une manière exemplaire. Faire en sorte que toute personne, quel que soit son rang, citée de près ou de loin dans les assassinats des journalistes soit entendue et condamnée si elle est reconnue responsable ".
Ils demandent également le démantèlement de l’industrie du crime qui s’enracine dans le pays. Aussi, les chevaliers de la plume veulent voir clair dans les différents procès des assassinats de leurs confrères. Faisant d’une pierre deux coups, les professionnels des médias ont profité de cette occasion pour rappeler à l’autorité budgétaire la dotation gouvernementale de deux millions de dollars à la presse. Jusqu’à présent, cette dotation n’est toujours pas réalisée et cela durant les deux années budgétaires, à savoir : 2007 et 2008.
Visiblement conscient du tort causé à la presse, le président de l’Assemblée nationale a rassuré les marcheurs que leur pouvoir est irremplaçable, tout en promettant que des mesures seront prises à cet effet, pour garantir la liberté d’expression et la sécurité afin que la démocratie participative soit réelle en République démocratique du Congo. A Lubumbashi, une dizaine de journalistes sont descendus dans la rue, pour la même cause. Ils ont remis le même mémo au président de l’assemblée provinciale du Katanga.
A Kananga, la marche est partie de la Cathédrale Saint Clément pour déboucher au siège de l’Assemblée provinciale. Sur place, les hommes de médias ont remis le mémo au bureau de l’assemblée provinciale du Kasai occidental
L’Avenir
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